Description
GuitArt QuArtet . Lucio Matarazzo . Oscar Bellomo . Gianvito Pulzone . Gianluca Allocca www.guitartquartet.it
Deux compositeurs se partagent l’espace sonore de cet album: le cubain Leo Brouwer, né en 1939 à la Havane, et le brésilien Egberto Gismonti, né en 1947, à Carmo, dans l’état de Rio de Janeiro. Tout rapproche ces deux personnalités, à commencer par une production artistique d’une ouverture exemplaire où musique populaire et musique sérieuse se conjuguent avec intelligence et talent. La guitare y occupe une place non négligeable: Brouwer consacre à l’instrument plus d’une soixantaine de compositions incluant de nombreux concertos tandis que Gismonti crée des sons nouveaux sur une guitare dotée de cordes supplémentaires et d’un accord spécial qui confère à son jeu et à sa musique un caractère tout à fait exceptionnel.
A la fin des années 1970s, Leo Brouwer se détourne du mouvement avant-gardiste auquel il adhère depuis un moment pour adopter un langage simple, nourri de musique classique et d’accents populaires. Sa Toccatapour quatuor de guitares, écrite à l’origine pour un ballet, en est un bel exemple. Les quatre guitares s’interpellent, se répondent, s’imitent, se complètent et se rejoignent avec vivacité; le résultat est vigoureux, tonique.
Acerca del cielo, el aire y la sonrisa date de la même époque. Cette composition en deux parties conçue pour quatre ensembles de guitares est réduite ici à un quatuor de guitares. La première partie de la pièce –La ciudad de las mil cuerdas – est de caractère minimaliste; des climats sonores plus surprenants les uns que les autres s’y succèdent alors que la seconde, Fantasia de los ecos, plus classique, ne dédaigne pas les situations humoristiques. Brouwer y place, à propos, une citation de Roland de Lassus “O la, o che bon eccho”
Un manuscrit datant de 1984 en témoigne, Cuban Landscape with Rain s’intitulait Serenata de Castres avant de devenir le premier d’un ensemble de « paysages cubains » que Leo Brouwer compose au fil des ans (Cuban Landscape with Rumba, 1985 – Paisaje cubano con campanas, 1987 – Paisaje cubano con tristeza, 1996 et Paisaje cubano con fiesta, 2008).
L’évocation de la pluie débute, dans cette pièce, par de délicates gouttes d’eau tombant d’abord de manière espacée puis plus abondamment jusqu’à se transformer en une véritable averse à laquelle succède un retour au calme. La version électronique de ce paysage cubain sous la pluie réalisée par Lucio Matarazzo pour cet enregistrement accentue les effets descriptifs de la composition de Brouwer et confère à l’évocation des trombes d’eau une ampleur impressionnante.
Pour l’exécution de son Cuban Landscape with Rumba, Leo Brouwer recommande l’usage de guitares préparées dans la première partie de la pièce, entendant par là le fait de modifier le timbre des instruments à l’aide de plusieurs accessoires. Le choix du GuitArt Quartet s’est porté sur l’emploi de morceaux de tissu qui, placés sous les cordes à divers endroits, modifient la couleur du son des quatre guitares sans en altérer l’accord.
Seize ans s’écoulent avant que le compositeur cubain ne manifeste à nouveau de l’intérêt pour le quatuor de guitares. En 2001, Brouwer dédie son Concierto italico pour quatre guitares et orchestre à cordes au GuitArt Quartet qui en assure la création, à Todi, sous sa direction. L’Italie ancienne y est suggérée de diverses manières dans trois mouvements aux titres évocateurs: Las predicciones de Italo Calvino, La nostalgia de d’Annunzio et Villanella napoletana. Les quatre guitaristes sont des familiers du genre, Angelo Gilardino a composé à leur intention son Concerto italiano, créé en 1999, et Gerard Drozd leur dédie, deux ans plus tard, son Concerto rapsodico opus 80 pour quatuor de guitares et grand orchestre joué pour la première fois au Festival International de Lublino, en Pologne. Le succès du Concierto italico, joué plus de 70 fois en Europe, aux USA et en Amérique du sud, enjoint le GuitArt Quartet à solliciter auprès de Brouwer un nouveau concerto. Le souhait des artistes est une oeuvre d’influence brésilienne. L’idée du compositeur est de répéter l’expérience de From Yesterday to Penny Lane basée sur l’arrangement pour guitare et orchestre à cordes de sept chansons des Beatles. Les acteurs de ce projet étant tous admirateurs inconditionnels de la musique d’Egberto Gismonti, c’est vers l’univers du jazzman brésilien que s’oriente, sans hésitation, le futurConcerto brasileiro. Il prend sa source dans une sélection de cinq thèmes de Gismonti dont quatre d’entre eux sont déjà bien familiers dans le monde de la guitare grâce aux intenses versions pour deux guitares des frères Assad. Brouwer conclut son arrangement en cinq mouvements par une Cadenza sobre Gismonti. Les âmes soeurs du cubain et du brésilien s’y rejoignent dans un condensé bouillonnant d’imagination. Les cinq thèmes – au milieu desquels se glisse furtivement celui des Sete anéis* – sont traités de manière fugace et magistrale. Comme il n’est plus question de concerto, Brouwer adhère à la coutume consistant à utiliser comme base du titre le nom de la personne à laquelle on rend hommage, dans ce cas-ci: Gismontiana.
Alliage fascinant de rigueur et de romantisme, la musique de Gismonti oscille entre une rythmique aussi complexe que créative et une expression mélodique dont la puissance n’a d’égale que sa sincère simplicité. Le musicien, issu d’une famille italo-arabe établie au Brésil, développe une forte personnalité, fruit de ces influences directes. Le Frevo et le Baião malandro témoignent de ses racines brésiliennes tandis que le lyrisme italien se fait sous-jacent dans Agua e vinho et A fala da paixão.
Avant d’en assurer la création avec l’orchestre à cordes Tartini au Teatro Carafo de Latina en 2008, le GuitArt Quartet présente au festival de guitare de Cordoba, en 2005, une adaptation pour quatuor de guitares réalisée par Lucio Matarazzo de cette Gismontiana (à l’exception du mouvement intitulé Loro dont l’écriture se prête moins bien à une version pour quatre guitares). Jouée de nombreuses fois en concert, cette version en quatuor se mêle harmonieusement aux compositions de Brouwer pour quatre guitares présentées dans cet enregistrement.
*composition de Gismonti écrite à l’occasion d’une exposition du sculpteur brésilien Antonio Peticov, en 1986, à Rio de Janeiro.
Avis
Il n’y a pas encore d’avis.